D comme douleur
processus artistique issu de Maudit soit l'homme qui se confie à l'homme: un projet d'alphabétisation de Angélica Liddell
25/09
Premier
jour avec le mot douleur. Je vais interroger le mot en le confiant à
d'autres, en le laissant résonner en moi, en étant attentive à ses
différentes manifestations. Je décide de le faire exister au
quotidien, de le rendre vivant. Le processus est engagé.
Une
amie me raconte son rêve de la veille. Elle caresse un petit
hérisson, qui n'a pas de poils piquants mais doux. Puis subitement
elle se met à le dévorer vivant, en lui mangeant la moitié de la
chair. Le hérisson se réfugie dans un coin pour pleurer de douleur.
Le
mot est prononcé, il appartient à son vocabulaire. C'est la
première représentation du mot.
26/09
À
la lettre D comme douleur, Angélica Liddell écrit une page blanche.
Est-ce qu'une page blanche s'écrit ? La douleur de la page
blanche... si l'on considère que la page blanche ne signifie rien.
27/09
Douleur
à l'orteil du pied gauche à cause d'une ampoule ou plutôt du
frottement du pansement dans la chaussure. Douleur évitable si je
choisis mieux mes chaussures.
28/09
Je
travaille sur Frida Khalo. La douleur est au centre de sa vie. Mais
la douleur n'empêche pas la vie.
29/09
Je
parle du projet à ma mère, la lettre et le mot qui m'ont été
attribués, et du processus que j'ai engagé. Je lui explique que
l'idée de créer une pièce est partie d'un abécédaire.
Elle ne réagit pas au mot douleur mais au mot abécédaire et me dit
que ma grand-mère a brodé un abécédaire. Elle décide de me le
donner.
30/09
Je
parle avec une amie du processus et du mot douleur sous la pluie.
Elle réagit au processus. Je retiens ce moment de conversation sous
la pluie avec cette amie.
01/10
Je
parcoure des carnets écrits à l'époque de mon effondrement. Je
n'ose pas les relire : la douleur est partout, mais le chemin
aussi.
02/10
Le
pansoral sur l'aphte naissant, une douleur vivace, que j'avais
oublié.
03/10
Une
amie me parle d'une douleur envolée à propos d'une lettre qui n'est
pas arrivée. Et puis D comme Daniel. Daniel est définitivement
mort.
04/10
Rien
sur la douleur.
05/10
Une
douleur que l'on ne peut nommer, existe-t-elle vraiment ? Ou
précisément, une douleur innommable est-elle la véritable
douleur ?
06/10
Je
récupère l'abécédaire de ma grand-mère paternelle fait au point
de croix sur canevas. Il est magnifique. Ma mère à propos de la
douleur ne dit toujours rien.
07/10
Je
vais voir La grande
bellezza au cinéma.
Dans le film, le mot douleur est cité une fois.
08/10
La
douleur peut-elle être muette ? La vraie douleur se tait ou se
crie.
09/10
Je
parle à un ami du processus, de la douleur. Duras bien sûr. La
douleur de Duras, bien
sûr. J'y avais pensé le matin même, à la pièce que j'avais vu
avec Dominique Blanc. Je pense aussi à Patrice Chéreau, mort la
veille.
10/10
Hier,
j'ai parlé à un ami de la douleur et je suis passée à côté de
la sienne, physique, concrète. Il souffre de spasmes dans les
intestins. 10 à 20% de la population, surtout des femmes, souffrent
du même mal, mais il ne souvient pas du nom. Il doit prendre des
médicaments et c'est tout ! Le diagnostique évacue
l'essentiel : trouver l'origine de la douleur au lieu de se
borner à traiter le symptôme.
Je
constate mon impuissance face à sa douleur.
11/10
Où
va se nicher la douleur de la naissance ?
12/10
Ce
matin, le parfum sur mon cou me brûle. Dans la nuit, je me suis
encore griffée, toujours au même endroit. La douleur est vive, mais
la surprise de la griffure lui est supérieure.
13/10
Je
regarde la définition de la douleur dans le Petit Robert. Il est
d'abord question de la douleur physique puis psychique. Elle est
associée à la souffrance, mais aussi à la plainte, la peine.
Jusqu'à quel point peut-on dissimuler la douleur ? Et que
devient une douleur qui ne trouve pas son expression ?
14/10
Une
amie entend dans le mot douleur : doux leurre.
15/10
Du
mot douleur, on peut extraire un abécédaire :
D
comme désir
O
comme ouverture
U
comme utopie
L
comme lumière
E
comme envie
U
comme union
R
comme rire.
16/10
La
montre de mon père à mon poignet, la douleur de son absence ne
s'efface pas.
17/10
Douleur
et douceur ne diffère que d'une lettre.
18/10
Je
me bloque l'épaule gauche. Le côté gauche renvoie au masculin chez
les gauchers. L'épaule renvoie à l'action. J'interprète ma
douleur.
19/10
Angélica
Liddell est espagnol. Douleur en espagnol se dit dolores. Dolores est
aussi un prénom féminin.
20/10
À
la radio, il y a une émission sur le bouddhisme. L'idéal à
atteindre pour le bouddhisme est de supprimer la douleur.
21/10
J'apprends
la mort de la mère d'un ami. Je pense à lui, à cette douleur
connue de la mort d'un parent. De sa douleur à lui, je n'ai aucune
idée.
22/10
Alfred
de Vigny a écrit : « En pensant à une fleur, on la fait
naître ».
En
ne pensant pas à la douleur, la fait-on disparaître ?
23/10
La
mort est présente en ce moment. Elle ne me concerne pas directement,
mais elle me touche. Ce matin, j'apprends que le fils d'un collègue
est condamné. C'est un enfant, tout juste une dizaine d'année, je
crois. Il aura passé la moitié de sa vie à se battre contre la
maladie. Les médecins ont décidé d'interrompre les traitements.
C'est la fin de la douleur pour lui. C'est la fin de sa vie. Cette
nouvelle m'affecte. Mais je ne ressens pas de douleur sinon une
projection de ce qu'elle pourrait être si j'étais concernée. Une
douleur qui n'est pas la sienne ne s'invente pas.
24/10
Une
amie répond instinctivement au mot douleur, Mater dolorosa.
Elle est mère et musicienne.
25/10
Marguerite
Yourcenar dans son livre Feux,
écrit à propos de la nouvelle Marie-Madeleine ou le
salut : « Nous
allions au-devant de toutes les douleurs pour l'enfantement d'une
nouvelle vie. » Ainsi la douleur est inévitable à
l'enfantement.
26/10
Un
ami à l'évocation du mot douleur se rapproche d'un mur et fait mine
de s'y fracasser la tête. Il me dit : « Pour moi, c'est
ça qu'évoque le mot douleur. »
27/10
Mon
corps est en douleur. Migraine dès le réveil, épaule gauche
détraquée. Faire le lien avec l'intérieur. La douleur n'est pas
toujours d'un langage facile. L'explication se bornera à la fatigue
et l'excès de vin bu la veille.
28/10
Je
lis dans le détail le livre D, D comme douleur, que les initiatrices
du projet ont réalisé et m'ont donné. Je lis les mots des autres,
des références. J'en oublie le mot douleur. Dans les extraits du
Larousse, je sème la douleur dans d'autres D comme défaillir,
dégager, déguerpir, dehors, dériver, descente, déserter, détaler,
devant, dévier, disparaître (ce dernier mot n'est pas inclus dans
les pages du dictionnaire, mais il s'impose à moi spontanément).
29/10
Je
cherche dans ma bibliothèque un livre contenant le mot douleur. Je
trouve de Le Clézio, Le jour où Beaumont fit connaissance
avec sa douleur. Le titre me
plaît. Un jour ou l'autre on peut rencontrer sa douleur.
30/10
Je
reviens aux pages du Larousse dans mon livre D. À la lettre D, il y
a une série de demi : demi-cercle, demi-deuil, demi-droite,
demi-fin, demi-finale, demi-fond, demi-frère, demi-gros, demi-heure,
demi-jour, demi-lune, demi-mal, demi-mesure, demi-monde, demi-mort,
demi-mot, demi-pension, demi-place, demi-plan, demi-quart,
demi-saison, demi-sang, demi-sel, demi-sœur, demi-sommeil,
demi-soupir, demi-teinte, demi-tour, mais pas de demi-douleur.
31/10
La
douleur fantôme existe. On l'évoque pour un membre amputé.
On
peut s'attacher à ses douleurs, s'y accrocher comme à de vieilles
manies. Un ami m'avait dit un jour qu'on chérissait nos douleurs.
Une manière d'exister, d'éprouver sa condition. Sans douleur,
l'homme perdrait-il un bout de lui-même ? Aussi, quand la
douleur s'exprime, elle mérite d'être interrogée.
01/11
Aujourd'hui,
je suis allée sur la tombe de mon père.
02/11
Dans
la nouvelle de Le Clézio, Le
jour où Beaumont fit connaissance avec sa douleur,
Beaumont déclare : « J'ai besoin de ma douleur,
maintenant, je ne suis plus rien que par elle. Et je l'aime. »
Mon ami avait raison. De plus, je note que la douleur peut devenir
constitutive de notre identité.
03/11
Je
regarde en détail l'abécédaire brodé par ma grand-mère
paternelle. Chaque lettre est assortie d'une feuille de houx. Je
m'attarde sur le lettre D, qui ressemble à un O. O comme ouverture.
À quoi une douleur peut-elle ouvrir ? O comme oubli. Peut-on
oublier une douleur ? Au centre du canevas, un âne regarde un
chien. Deux oiseaux volent. Un moulin et une maison sont représentés,
ainsi que d'autres détails. Mais je remarque papa, maman, ainsi que
le nom de ma grand-mère, Amélie Dumas née le 5 avril 1908,
Vaugneray 1918. Elle avait 10 ans. Que savait-elle de la douleur à
cet âge ?
04/11
Je
pense qu'il est possible de s'inventer des douleurs et que ces
« douleurs » masquent d'autres réalités. Mais
lesquelles ?
05/11
Jean-Louis
Murat dans son album Dolores ne cite pas une seule fois le mot
douleur. Il chante les femmes et l'amour.
06/11
Certains
mettent toute leur énergie à ne pas reconnaître et prendre en
considération la douleur. D'autres à l'inverse l'explorent de fond
en comble pour découvrir ce qu'il y a au bout.
07/11
La
douleur est souvent effrayante. Elle est associée à la peur. La
peur elle-même peut engendrer la douleur.
08/11
La
douleur a toujours une origine. Mais quelle est sa destination ?
09/11
La
douleur peut être nécessaire parfois salutaire, seulement si elle
s'accompagne d'une prise de conscience et induit un changement, une
transformation. Toute douleur serait ainsi vouée à l'évolution.
10/11
La
douleur est-elle mesurable ? Existe-t-il des douleurs plus
légitimes que d'autres ?
11/11
Mon
frère à propos de la douleur me parle spontanément de la perte
d'un être cher. Pour lui la douleur est nécessairement
insupportable même si elle ne dure pas forcément. Elle est
nécessairement violente et nous met face à notre impuissance à
agir pour la faire cesser. Nous n'avons aucune prise sur notre
douleur, aucune maîtrise.
12/11
Ce
soir Arte diffuse La Shoah. Cette période de l'histoire nous
renvoie à une douleur qui porte atteinte à l'humanité tout
entière.
13/11
Je
cherche dans le journal Libération le mot douleur. Dans un
article sur « les bonnets rouges », je lis : « ...
mais j'invite chacune et chacun à bien méditer la force des mots,
les conséquences des mots. »
La
douleur est un mot qui porte en lui une force, redoutée et dont les
conséquences sont innombrables. J'aime cette idée de la réalité
d'un mot, de la responsabilité de chacune et de chacun vis à vis
des mots, choisis pour leur force et leurs conséquences.
14/11
Dans
un film, j'entends : « J'espère que la douleur l'empêche
de dormir. À vie. » On peut souhaiter à l'autre la douleur ou
au contraire vouloir la lui épargner à tout prix. Certains
éprouvent une forme de plaisir dans la douleur, la leur ou celle des
autres.
15/11
Une
amie me dit : « Pour moi, la douleur est intérieure. »
16/11
On
doit accoucher de la douleur. Une douleur avortée ou larvaire génère
frustration, inertie, amertume et désengagement. On doit sitôt
identifiée prendre sa douleur à bras le corps et la tordre. Il faut
du courage, de la force et de l'honnêteté. Sans quoi la douleur
prend toute la place, la place de la vie.
17/11
Quand
j'ai parlé à ma sœur de la douleur, elle m'a proposé d'écrire un
texte. Quand je l'ai reçu, il était question de souffrance. Je lui
ai précisé qu'il s'agissait de douleur. Elle m'a répondu qu'il y
avait une nuance et qu'elle allait en écrire un nouveau. Je
l'attends.
18/11
Une
journée sans douleur, est-elle une journée gagnée ?
19/11
À
la radio, Sorj Chalandon parle de la douleur du traître. Ainsi,
l'autre peut symboliser une douleur.
20/11
Je
suis persuadée qu'il existe des douleurs choisies autant que subies.
Choisies parce qu'elles sont évitables. Néanmoins elles nous
permettent de prendre conscience de nos limites, de distinguer
l'insupportable du supportable.
21/11
À
la radio, ils font la promotion d'une pièce d'Angélica Liddell. Il
est question au sujet de la pièce de misanthropie, de rage et d'arme
à feux, mais pas de douleur. Une page blanche à nouveau.
22/11
Douleur
aux cervicales, la tête est prise. Je la connais par cœur cette
douleur. Pourtant, elle me surprend chaque fois. Mon corps s'en
étonne encore.
23/11
La
douleur d'aimer. J'aimerais savoir ce que cela veut dire exactement.
Il me semble qu'aimer ne doit pas être une douleur, au contraire.
S'il est question de douleur, ce n'est pas l'amour qui est en jeu.
24/11
Une
amie vient de perdre une amie chère d'un cancer au cerveau, morte le
jour de sa naissance à l'âge de 31 ans. À nouveau, la douleur liée
à la mort. La douleur de celui qui meurt, elle gémissait dans ses
dernières heures. La douleur de ceux qui restent. Et contre la
douleur de l'absence, il n'y a définitivement rien à faire.
25/11
La
douleur de l'autre, je m'interroge encore sur ses répercussions. De
quelle manière, elle agit sur nous ? En quoi, elle nous renvoie
à nous-mêmes ?
26/11
L'amie
endeuillée est en pleine rupture. C'est lui qui l'a quittée. Les
douleurs s'accumulent. Dans un sanglot à peine étouffé, elle me
confie : « En ce moment, je dors avec une bouillotte et
une peluche. » Ses mots contiennent en eux la douleur. Ses mots
me pincent le cœur.
27/11
La
vie contraint à des deuils qui s'accompagnent de douleur. Le deuil
induit un avant et un après. Et l'après contamine l'avant qui
devient lui-même douleur.
28/11
J'apprends
qu'une de mes amies est gravement malade sans savoir la nature exacte
de sa maladie. Par pudeur et peur de l'apitoiement, elle ne la nomme
pas. La douleur de l'inquiétude, la peur liée à la projection, à
l'anticipation. Peut-on éprouver de la douleur pour ce qui n'existe
pas, pour ce qu'on imagine ? La douleur serait alors uniquement
liée à nous et non tournée vers l'autre.
29/11
Je
croise les yeux embuées d'une amie en deuil qui fête son
anniversaire. À part la serrer dans mes bras, je ne trouve rien à
faire.
30/11
La
douleur est sournoise. Parfois elle se tapie dans un coin et attend
la moindre faiblesse pour ressurgir. Pendant ce temps de latence,
elle s'est déployée à l'intérieur de nous. Quand elle s'éveille,
elle est démesurée.
01/12
La
douleur des déracinés dans le film The Immigrants. Apprendre
à perdre pour s'inventer une place. Trouver en soi le territoire à
habiter pour circonscrire la douleur.
02/12
Certaines
douleurs d'enfance grandissent avec l'âge, tant qu'elles ne sont pas
reconnues.
03/12
Baudelaire
interpelle sa douleur et lui demande de se tenir tranquille. On peut
entrer en dialogue avec sa douleur, apprendre d'elle autant qu'elle
nous apprend de nous.
04/12
La
douleur physique ne sait pas se tenir tranquille. C'est donc à nous
de nous tenir tranquille autant que possible.
05/12
La
journée commence avec cette phrase entendue à la radio :
« Nous aimons les larmes et les douleurs. »
06/12
Chez
une amie à Paris, je parcours un livre de Sophie Calle, M'as tu
vu ? Un de ses projets se nomme Douleur exquise dont
la définition est précisée :« douleur vive et nettement
localisée. » Son travail Douleur exquise est associée
à « une rupture banale » écrit-elle, « mais
[qu'elle] a vécu alors comme le moment le plus douloureux de [sa]
vie. » Puis « C'est une image du bonheur qui m'a fait le
plus souffrir. » Ainsi, quand le bonheur s'arrête, il devient
douleur.
07/12
Ma
mère est malade, un virus sans gravité. L'inquiétude de mon frère
ravive d'autres douleurs voisines. Ne surtout pas mélanger les
douleurs.
08/12
Toujours
cette douleur à l'épaule gauche, latente et persistante. Je finis
par m'habituer à la ressentir, mais dès que je lui prête
attention, elle s'intensifie.
09/12
Je
photographie les brouillons de la douleur comme une trace, une
preuve. La douleur laisse des traces mais elle se dispense de
preuves.
10/12
La
résistance à la douleur dépend de chacun. Il n'y a aucune échelle
de valeur valable.
11/12
Certaines
douleurs sont considérées comme naturelles, d'autres mensongères
dissimuleraient des réalités plus insupportables que la douleur
elle-même.
12/12
Depuis
3 mois je chemine avec la douleur, j'éprouve le mot et ses réalités,
la mienne et celle des autres. Je ne sais pas encore ce que le mot
douleur a changé en moi, mais je suis à peu près sûre que cette
errance a eu et aura des répercussions, visibles ou non.
13/12
Je
décide avant de m'endormir de soumettre à certains de mes amis et
connaissances le mot douleur.
14/12
On
doit prendre la douleur au sérieux, au même titre que la beauté et
l'amour.
15/12
Aujourd'hui
c'est l'anniversaire de mon père. Il aurait eu 84 ans.
16/12
J'entends
à la radio le mot sans douleur, à propos d'un homme qui meurt
entouré de ses enfants. Quand la douleur est absente d'un tel
moment, elle mérite d'être signifiée.
17/12
Dans
un documentaire, De chair et d'âme, un tétraplégique dit :
« Ce qui contredit le repos,
c'est la douleur. » Point de repos dans la douleur.
18/12
Les
mots « soins palliatifs » me frappent. Je les connais, je
sais à quelle réalité objective, concrète ils me renvoient. Ils
me ramènent à une douleur qui est enfouie en moi, sous mes pieds,
l'abîme.
19/12
Dernier
jour avec le mot douleur. Il aura voyagé vers les autres, en moi, je
l'aurai traversé. Sans doute ces allers et retours auront bougé des
lignes intérieures, modifié la physionomie de mon regard.
Dorénavant, je regarderai au-delà, plus loin...
20/12
J'ai
envoyé le 14 décembre à 46 personnes, 32 femmes et 14 hommes le
message suivant : « Merci
de me dire en un mot, une phrase ou plus, ce que vous inspire la
douleur. »
À
ce jour, 12 femmes dont une enfant et 4 hommes.
Le
14:12
C :
La mort
M :
Aïe
P :
La douleur, c'est l'absence.
S :
Quand je me suis séparée de Dimitri, je souffrais tellement que
c'était devenu physique et j'avais presque envie de mourir. Je
m'étais achetée une paire de Salomé brune avec de hauts talons,
qui me faisaient mal aux pieds et je les portais assez souvent.
J'avais l'impression que la douleur de la rupture était moins
importante. Ça me faisait penser à autre chose. La douleur de mes
pieds déviait la vraie douleur. J'ai toujours mes chaussures mais je
ne les porte plus.
S :
La douleur, nom féminin, état humain inévitable à un moment donné
de la vie. Tout le monde y passe. En premier lieu, on la subit.
D'autres la provoquent. Certains petits malins essaient de la
maîtriser ! Chacun ayant son propre niveau de tolérance à la
douleur.
O :
Marguerite du rat.
C :
Des aiguilles sous les ongles.
Le
15/12
V :
C'est quand on tombe, que l'on se cogne une partie du corps.
F :
Un membre tordu, un angle mauvais, déformé ou contraire, un objet
pointu dans l'oeil ou le cœur, une migraine, une grimace, un combat.
A :
Aïe.
C :
La douleur la plus insupportable est celle ressentie par ceux qu'on
aime.
Le
16/12
M
(réponse par mail intitulé Photo réponse à ta question) :
La
photo d'un mur sur lequel est écrit en rose : « Dans la
vie on a qu'une seule douleur ».
M
ajoute : « Si la lettre L devient un C... »
H :
L'implosion du corps, l'esprit rendu fou, voilà ce qu'est la
douleur.
C
(réponse par message sur mon répondeur) :« Salut
Valérie, c'est C. J'ai eu ton texto par rapport à la douleur donc
moi j'y réponds. C'est pas un mot, mais c'est une musique. C'est la
musique d'Astor Piazzolla, qui est accordéoniste et c'est un certain
CD que j'ai chez moi, rouge et noir, et une certaine musique. Voilà !
La douleur pour moi c'est Astor Piazzolla. Voilà ! Si tu veux
en savoir plus et si tu veux que je te fasse écouter cette musique,
on peut se rappeler. Je t'embrasse.
P :
Douleur : bien plus que son intensité, la peur panique de
rester coincé, bloqué, forcé, tassé dedans pour une éreintante
étreinte.
Le
17/12
M :
La phrase qui m'inspire la douleur, c'est l'abandon et le départ
pour toujours. C'est La douleur de Duras.
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